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ANALYSE

144

Evaluation de la clef géographique des Centuries

par Jacques Halbronn

    L’Epître centurique à Henri II comporte de nombreuses références géographiques ou plus exactement est truffée de latitudes qui renvoient visiblement à un atlas, notamment :

   “Délaissant les 50 et 52 degrez de hauteur et seront tous hommes des religions loingtaines aux regions de l’Europe et de Septentrion de 48 degrez d’hauteur”
   “Puis après en sortira du tige celle qui avoit demeuré tant long temps sterile, procédant du cinquantiesme degré qui renouvellera toute l’Eglise Chrestienne”

   Le repère géographique apparaît comme un moyen assez sûr de corriger le texte, en tout cas de mesurer son degré de corruption, car si un mot peut en remplacer un autre, il n’en est pas ainsi pour ce qui est des noms de lieux. Accumulation dans les Centuries de noms de lieux que l’on peut tenter d’identifier dès lors qu’au sein d’un même quatrain figurent des lieux appartenant à la même région à telle enseigne, comme le propose Chantal Liaroutzos1, que l’on peut se demander si le rédacteur des Centuries n’a pas eu carrément recours à des “Guides de voyage”2 comme il en existait de son temps.

   Dès 1652, Jacques Mengau recommandait un tel mode de contrôle :

   “Au lieu de Houdan, vous y trouvez Noudam, au lieu de Maulette, vous y trouviez Maiotes; si je n’eusse pas fait la recherche fort exacte du nom de ces villes, par le moyen des cartes anciennes & modernes l’explication de ce quatrain (IX, 56) n’aurait pas esté iamais (sic) connue ny entendue.”3

   Il convient de saluer l’oeuvre de Mengau, non seulement du point de vue d’une exégèse qui n’est pas toujours bien inspirée - ne voit-il pas, sur la foi d’un quatrain, le roi se rendre en Avignon ? - mais surtout en tant que pionnier d’une certaine rigueur :

   “J’ay résolu de faire imprimer les véritables prophéties avec des tables où l’on verra la suite des quatrains, qui se suivent en chaque matière, avec un petit dictionnaire pour expliquer la plus grande partie des mots les plus difficiles & desquels j’en ay la connaissance”4

   Il semble que ce projet n’ait pas été mené à bien ou ne nous soit en tout cas point parvenu.

   En 1552, juste à l’époque où Michel de Nostredame est supposé avoir rédigé ses premières centuries, paraissait la (sic) Guide des Chemins de France de Charles Estienne5 lequel connut plusieurs éditions.6

   Il apparaît, en effet, que nombre de quatrains renvoient à une région précise - villes, rivières etc - et que l’on peut en quelque sorte les classer selon celle-ci : quatrains des Flandres, quatrains de Bretagne, quatrains du Languedoc, quatrains du Dauphiné, quatrains de Bourgogne, quatrains d’Ile de France etc. Si les centuries ont intégré tout un atlas, rien d’étonnant à ce que l’on y retrouve une allusion à un événement qui prit place ici ou là. Pour faciliter cette recherche, on se demande pourquoi les Centuries n’ont pas été publiées avec une liste des lieux, au sein d’un même quatrain, et l’indication du ou des quatrains correspondants. Quand il s’agit de villes connues, il est bien difficile de pouvoir démontrer que le rédacteur des Centuries ou du moins les sources auxquelles il a recouru, ont eu affaire précisément à la Guide d’Estienne à moins de prouver que l’ordre même des lieux est celui préconisé par Charles Estienne. Mais il est un cas, particulièrement célèbre et qui défraya la chronique jusqu’à amener Georges Dumézil à lui consacrer un texte, c’est celui de Varennes, toponyme qui figure au quatrain 20 de la centurie IX.

De nuict viendra par la forest de Reines
Deux parts, voltorte, Herne la pierre blanche
Le moine noir en gris dedans Varennes
Eslu cap, cause tempeste, feu, sang, tranche

Dumézil et la cinquième centurie

   C’est ainsi, en effet, que G. Dumézil, dans Le moyne noir en gris dedans Varennes (Paris, Gallimard, 1984, pp. 117 et seq) écrit : “On admet en général que la cinquième centurie des Oracles7 a été publiée tout de suite après la mort (sic) de Nostradamus. Or, on lit, ce qui est rare, une série de quatrains numérotés de 74 à 82 qui peuvent être rapportées sans trop d’artifice à un même événement, annoncé en termes obscurs, à savoir l’apparition d’un personnage prestigieux qui sera, pour l’Eglise, à la fois un restaurateur et un réformateur, et généralement un “grand législateur”…” Dumézil a le bonheur d’y trouver (p. 118) la triade romaine qui est au coeur de ses travaux :

V, 77
Tous les degrez d’honneur Ecclesiastique
Seront changez en dial quirinal
En Martial quirinal flaminique

Puis un Roy de France le rendra vulcanal

   Il s’agit là d’un passage que l’historien français rapproche - suivi en cela par P. Brind’amour - d’un texte de Verrius Flaccus, sur ce thème. Par ailleurs, Dumézil identifie une source “livienne” dans le quatrain 75 de la centurie V.

Montera haut sur le bien (pour lieu ?) plus à dextre
Demourera assis sur la pierre quarrée
Vers le midy posé à sa senestre
Baston tortu en main, bouche serrée

   Tite Live :

   “Conduit par un augure (...) sur le Capitole, il s’assit sur une pierre, tourné vers le midi. L’augure prit siège à sa gauche, la tête voilée, tenant dans sa main droite un bâton recourbé sans noeuds, qu’on appelle lituus. ”

   Qu’en disent les commentateurs post-Varennes (voir Livre II) ?

   Voici la “traduction” de Collin de Plancy (La Fin des temps, 1840) :

   “De nuit le mari et la femme viendront par la forêt de Reines, le chemin est divisé en deux parts : la belle reine vêtue de blanc, le roi qui a la dévotion d’un moine, vêtu en gris, entreront dans Varennes.8 Ce roi déclaré chef, l’incendie, les agitations, le meurtre et le pouvoir du glaive s’ensuivront.”

   Citant Bouys et ses Nouvelles Considérations sur les Oracles de 1806 (p. 58), le texte se poursuit ainsi :

   “On dira sans doute qu’en lisant Reine dans herne et Roi dans noir, on verra dans Nostradamus tout ce qu’on voudra (..). Le sens indique assez que ce ne peut être que le Roi de France qui était en gris et la Reine qui était en blanc, cette pierre précieuse blanche qui sont passés par la forêt de Reines, sont arrivés de nuit dedans Varennes et par voir détournée Voltorte”

   C’est un fait que le nom de Varennes figure dans ce quatrain mais était-ce bien le Varennes lié à la fuite de 1791 ?9 Et quand bien même le serait-ce, vu le caractère extrêmement riche de la toponymie centurique, est-ce que cela renvoie aux dits événements ? Ou bien peut-on faire dire à Nostradamus, comme le craignait Bouys, ce que l’on veut ? Dans quelle mesure la Guide d’Estienne peut-elle nous aider à résoudre un tel problème ?

   Bonnerot a constitué, en son premier tome, un index des lieux cités dans cet ouvrage. On trouve plusieurs Varennes, selon le contexte : dans l’Allier, dans le département du Loir et Cher, dans l’Eure et Loir, dans le Maine et Loire. Point en Argonne, dans le département de la Meuse en cette région qui concerne la fuite de Louis XVI.10 Il existe d’ailleurs de nombreux autres Varennes non signalés par Estienne, notamment dans le département actuel de la Haute Marne, dans celui de la Nièvre.

   Quel est le “Varennes” que désignait dans le quatrain de la IXe Centurie, le rédacteur des Centuries ? Quels étaient les lieux portant ce nom à cette époque ? Si un travail préalable de classement des quatrains et d’identification géographique avait été effectué, estime J. P. Clébert, on eût probablement évité certains égarements étant donné qu’un toponyme isolé est rarement univoque.11

   Au demeurant, n’existerait-il pas une continuité entre quatrains se faisant suite, ce qui permettrait encore mieux de cerner la question de la localisation ? D’autant que les quatrains 19 et 20 ont un premier verset assez symétrique : forest Mayenne, forest de Reines.

   On proposera d’apporter au dossier le quatrain qui précède.12

Quatrain 19 Centurie IX
Dans le milieu de la forest Mayenne
Sol au lion la foudre tombera
Le (in)grand bastard yssu du grand du Maine
Ce jour Fougeres pointe en sang entrera


Quatrain 20
De nuict viendra par la forest de Reines
Deux pars vaultorte Herne la pierre blanche
Le moine noir en gris dedans Varennes
Esleu cap. cause tempeste, feu sang tranche

   Le contexte géographique est ici à l’évidence, comme l’a montré, après J. P. Clébert13, Chantal Liaroutzos, celui du Maine et de la Loire. Mais a-t-on besoin de lire Estienne pour s’en assurer ? On est en tout cas bien loin de l’Est de la France : Mayenne, Blois, Loire, Maine, c’est plutôt l’Anjou que la Champagne. Reines ne pourrait il être tout simplement Rennes la grande ville proche plutôt que Reims voisine du Varennes qui fut fatal à Louis XVI ? Dans ce dernier cas, l’on pourrait évidemment songer à tel Grand du Royaume et c’est là une dimension supplémentaire de la géographie nostradamienne, à savoir qu’elle s’articule sur une noblesse porteuse également de tant de noms de lieux : est ce que le signifiant Vendôme, d’ailleurs proche de cette région, désigne la ville ou la famille ? Ambiguïté peut-être voulue mais qui, de toute façon, démultiplie les possibilités de corrélation. “Yssu du Maine”, par exemple renvoie autant à la topographie qu’à la généalogie. Certaines explications en italique permettront de compléter un quatrain :

Voyages, p. 41 :
“Forest de Mayenne. Heruée (sic), lande au milieu de laquelle il y a un orme et sur icelles un estendart faisant séparation de Maine & Bretaigne.”

   Voilà qui explique “Dans le milieu de la forest Mayenne”.14

   Cela dit, qu’en est il de Varennes ? On a signalé un Varennes de la Guide dans le département du Maine et Loire15 bien que ce Varennes là ne figure justement pas dans le Dictionnaire Larousse actuel, du fait du non-événement.

   Fougères est de nos jours un chef lieu d’arrondissement de l’Ile et Vilaine, ce qui renforce la leçon “Rennes”. La Moine, terme si important pour l’exégèse nostradamique, est une rivière qui passe à Cholet mais, plus simplement, c’est une allusion à Maine, en un temps où l’on distinguait peu “ai” et “oi”. L’on pourrait à la rigueur voir dans la foudre une allusion à La Flèche. Qui sait si le rédacteur des Centuries n’a pas joué avec la Vienne pour construire “viendra” ? Est-ce qu’Ingrandes a donné “grand” ? Les ponts sur la Loire, quant à eux, abondent. Le Lion ne renvoie-t-il pas au Lion d’Angers, aujourd’hui chef-lieu de canton ? On est surpris en tout cas de voir R. Benazra ne faire figurer sur une carte de France que le Varennes de l’Argonne16 alors que la seule mention dans les Centuries de ce lieu le situe à l’Ouest, le critère géographique constituant un garde fou. A lire son étude, qui ignore les travaux de Clébert,17 la Bretagne et le Maine auraient été quasiment ignorés des quatrains, en dehors de Nantes et d’Angers. Pas question de Rennes, de Fougère, de Mayenne, villes qui pourtant entourent Varennes dans les quatrains.

   On note que le Sud est surreprésenté18 par rapport au Nord, déjà dans la Guide, ce qui nous confirme dans la thèse que le travail d’Estienne consista d’abord à définir des “chemins” vers des lieux saints, apparemment moins significatifs en Flandre alors qu’à l’opposé les Pyrénées, autre région frontière, sont dans la Guide mieux balisées.

   En quoi sa lecture et celle de ses suppléments constitue-t-elle une meilleure hypothèse pour rendre compte de l’oeuvre nostrnostradamique, que l’étude d’une carte comme se sont contenté de le faire un Clébert ou un Benazra ? Il ne semble pas que Ch. Liaroutzos en ait apporté la preuve formelle. Nous essaierons de montrer que le rédacteur des Centuries a emprunté également quelques commentaires d’Estienne.

   Abordons donc la lecture de la Guide pour nous conforter dans l’idée que le faiseur de certains quatrains des Centuries, a eu l’ouvrage en main et notamment ce qui est consacré à la (sic) Duché de Bretaigne (p. 133 de l’édition de 1553) : à la page 137, nous trouvons “Passe la forêt de Mayenne. puis en dessous Vaultorte19 (ailleurs Vaultortu) puis Heruee qui correspond, selon Bonnerot (1936, p. 142)20 à Ernée, chef-lieu de canton de la Mayenne, qui pourrait bien avoir donné Herne (“Deux pars vaultorte Herne la pierre blanche”) Ingrande est sur la route d’Angers à Nantes (p. 141). On trouve même la forest de Renes (p. 138) si l’on veut joindre directement Mayenne, chef-lieu d’arrondissement du département du même nom - la Mayenne étant également une rivière - à Rennes.

   Une question se pose à ce stade : pourquoi trouve-t-on Hernes dans toutes les éditions des Centuries connues et Heruée dans les éditions répertoriées par nous des Guides ou des Voyages ? On imagine mal le rédacteur des Centuries rétablir ou modifier ce toponyme et encore moins un éditeur plus tardif ignorant le référentiel utilisé. Nous avons deux hypothèses à notre disposition : soit, la première édition non conservée des Centuries comportait Heruée et correction il y a eu, soit l’édition de Ch. Estienne utilisée comportait elle Hernes et non Heruée. Le fait est en tout cas que ce toponyme ne figure pas dans le quatrain concerné sous la forme que l’on trouve dans les itinéraires estienniens.

   La Guide nous propose (pp 137-138) des itinéraires “A Renes (sic) par Vittray”, “A Renes, le plus droict”, “A Renes par Angers” et page 140, on trouve le lieu-dit “la pierre blanche” : Renes, en dessous Vesin, puis L’Hermitage puis la pierre blanche que Clébert a identifiés sans passer par Estienne. On nous recommande à de nombreuses reprises de “passer le pont” (ex. p.137).

   Même la mention du temple (“Le Temple” sur la route de Nantes à Vannes, p. 143 de la Guide de 1553) figure dans ce triptyque, au quatrain 21, ce qui conviendra à merveille pour annoncer le lieu d’emprisonnement de la famille royale.

Les Saincts Voyages

   Toutefois, nous ne pensons pas que le récacteur des Centuries ait utilisé la Guide des Chemins de France d’Estienne dans les premières éditions de 1552-1553 sinon de façon marginale. Chantal Liaroutzos semble ignorer qu’en 1552 paraissait un autre Guide, à l’initiative du même Estienne et que signale J. Bonnerot dans l’introduction qu’il donne en 1936 (pp 10 et 22) : Les voyages de plusieurs endroits de France et encores de la Terre Saincte, d’Espaigne, d’Italie et autres pays. Les Fleuves du Royaume.21 Les relations entre ces deux textes sont assez complexes. En 1552 les Voyages paraissent avec leur annexe “fluviale”, laquelle ne figure pas dans les deux premières éditions de la Guide, parues en 1552.22 Puis en 1553, cette annexe est placée à la fin de la Guide tandis que les Voyages connaissent notamment des éditions rouennaises en 1553.23 Il semble bien toutefois qu’à la date où parurent les premières Prophéties, la fusion des deux volumes n’était pas encore intervenue.

   Puis, la Guide continuera à paraître en incluant des développements des Voyages sous le titre de Nouvelle Guide des Chemins pour aller et venir par tous les pays et contrées du Royaume de France. Plus le chemin de Jérusalem, Romme et certains lieux de la Terre Saincte dont on connaît une édition de 1583, chez Nicolas Bonfons (BNF, L 25 2). Or cette édition, si elle ne fournit plus les Fleuves du Royaume, comporte in fine, bien que le titre ne le précise pas, les pèlerinages français : les deux volumes ont bel et bien fusionné et le contenu des Voyages fut accessible pendant des décennies après leur première parution de 1552. Même évolution avec la Suite de la Guide des Chemins tant de France que d’Espagne, Italie et autres pays, contenant le voyage de Rome, de N. D. de Montserra et de la Sainte-Cité de Jérusalem Avec les Fleuves et rivières du Royaume de France qui parut en 1583 chez Benoît Rigaud (Ed 1566, BL C 32 a 41). De fait, nous ignorons si le rédacteur des Centuries a utilisé un ouvrage intitulé La guide des Chemins de France “pour aller et venir” ou la Suite de la Guide ou bien s’il a eu surtout accès aux Voyages, l’amalgame entre les deux textes sous le nom du Guide pouvant s’être produite après la parution des Prophéties. Il ne s’agit là au demeurant que d’une question d’intitulés et l’on ne peut fixer avec précision ces changements d’intitulés. Ce qui est certain, c’est que le rédacteur des Centuries ne s’est pas servi des premières éditions de la Guide des Chemins de France de 1552 et 1553.

   La lecture des catalogues de bibliothèques (British Museum, National Union Catalogue) révèle que de nombreuses éditions furent le fait du libraire lyonnais Benoît Rigaud. En 1558, Rigaud publie avec I. Saugrain la Guide des chemins pour aller et venir par tout le Royaume de France et autres pays circomvoisins (Newberry Library, Chicago), ouvrage qui reparut en 1566 à Lyon. Autre édition sous le même titre, en 1596. (Bibl. Harvard University, Newhaven). En 1601, les Héritiers de Benoist Rigaud publient une Suite de la Guide des chemins tant de France, d’Espagne, Italie (Bib. Harvard University).

   Lorsque l’on sait que cette famille de libraires est volontiers associée par ailleurs à la publication des Centuries, l’on constate que les deux textes, la Guide augmentée des éléments des Voyages et les Prophéties figuraient vraisemblablement dans un même catalogue et que la lecture de l’un pouvait aisément renvoyer à l’autre. On est en droit de se demander si certaines personnes étaient conscientes de la parenté entre les deux livres et s’il était admis que les Prophéties étaient une sorte de paraphrase en vers de la Guide.

   En effet, alors que l’on pourrait croire qu’Estienne a réalisé deux volumes complémentaires, les Voyages nous apparaissent plutôt comme une édition amplifiée de la Guide comportant donc l’essentiel des données de la Guide et c’est pourquoi ils comportent dans leur titre la même mention “Les Fleuves du Royaume”. Au bout du compte, la Guide sera rééditée et non les Voyages24

   Estienne, s’adressant “au lecteur” présente ainsi ce livre de “saincts voyages” :

   “Au demeurant, (l’auteur) te veut advertir que combien que sa première intention fust de ne passer par cette fois les limites de la France, qui sont les mers & montaignes, desquelles elle est borné de toutes parts, toutefois (…) il ne s’est peu tenir de toucher les principaux & plus frequentez voyages en Italie, Espagne et Terre Saincte. Combien que grande partie des lieux principaux (...) sont descrits au traité de la Guide des Chemins de France, toutefois pour ne point donner cette peine au lecteur de recourir si loing & aussi pour la plus grande seureté et commodité d’iceluy, nous les avons reprins en ce lieu.”

   L’étonnant est que malgré tout, l’ouvrage ne comporte que 120 pages avec les tables - Fleuves du Royaume compris - au lieu de 256 pages pour l’édition de 1553. En ne précisant pas au titre “saincts voyages”, Estienne pensait vraisemblablement toucher un plus large public et donc faire coup double.

   La plupart des arguments avancés par C. Liaroutzos valent pour les Saincts Voyages, y compris le cas Varennes qui figure à la page 42 (pèlerinage à St Julien de Vouvantes (sur la route d’Orléans à Rennes par Angers, dans la Guide, pp 138-139) des Voyages aux côtés de Vaultorte et de Mayenne et qui fut probablement choisi pour rimer avec Rennes. Mais l’on trouve également dans les Voyages d’Estienne les villes étrangères qui marquent un grand nombre de quatrains, point qui avait été laissé de côté. Les pèlerinages vers Rome comportent les itinéraires les plus divers, passant notamment par la Suisse et par l’Allemagne, ce qui est l’occasion d’une moisson supplémentaire de toponymes. En outre, les Fleuves du Royaume qui font suite aux Voyages proprement dits élargissent encore le champ de ce petit volume d’un peu plus de 100 pages si bien qu’il y est question de certaines villes de l’actuelle Belgique ainsi que de cours d’eau traversant ces régions. tel l’Escaut (Scelde) ou de la Suisse pour le Rhône qui passe par le Lac Léman.25

   Les Voyages reprennent en fait des pages entières de la Guide, sans aucun changement. Seules les têtes de chapitres changent le plus souvent comme le montrent les tables des matières respectives.

   Dans la Guide, les entrées désignent le découpage en provinces : Picardie... Normandie, duché de Bretaigne..., pays d’Auvergne etc.

   Dans les Voyages, comme le note Bonnerot, les destinations concernent des lieux de pèlerinage, certains propices aux guérisons. Le titre de l’ouvrage n’est d’ailleurs guère explicite à ce propos hormis la mention “Terre Saincte” comme si un mot manquait “plusieurs endroits (saincts) de France”. On ne suit pas Bonnerot lorsqu’il écrit : “Le titre (...) disait clairement qu’il s’adressait aux pèlerins” (p.10).

   Les Voyages, quand on ouvre l’ouvrage, sont divisés en un certain nombre de destinations à vocation religieuse, de Rome à Saint-Jacques de Compostelle, avec toute une série de “Notre Dame” qui viennent en fait se substituer aux intitulés de la Guide, sans que l’itinéraire en soit pour autant changé. On y trouve cependant plusieurs renvois à la Guide. L’on peut toutefois se demander si l’idée première de la rédaction de ce texte ne fut pas précisément d’aider les personnes souhaitant accéder à telle ou telle relique et si l’on considéra que l’on pouvait à peu de frais transformer l’ouvrage en un document plus généralement touristique ou bien si c’est l’inverse qui se produisit. Le fait que la Guide parut en premier n’est pas en soi décisif, l’on peut en effet supposer que l’on préféra d’abord toucher le public à travers la Guide puis, constatant son succès, lui proposer le projet initial qui, d’ailleurs, ne fit pas l’objet d’une réédition. Il n’est pas aisé de trancher. Il faudrait pour cela démontrer qu’Estienne propose dans sa Guide des itinéraires qui ne se justifieraient point s’ils n’impliquaient des passages par tel lieu consacré. En tout état de cause, la matière des Voyages aurait été amplifiée par rapport à celle de la Guide à moins que l’on n’ait au contraire procéder à des coupes.

   Prenons l’exemple de la Savoie :

   Dans les Voyages, on donne comme destination Saint-Jean de Morienne à partir de Lyon. Dans la Guide, la même notice se divise en deux : A Chambéry. (p. 162) A Saint-Jean de Morienne (p. 163).

   Le fameux quatrain 20 de la centurie IX est mis en quelque sorte dans la Guide en rapport avec la Duché de Bretaigne et dans les Voyages avec le pèlerinage de Saint-Main. qui n’est même pas mentionné dans la Guide. Dans la Guide, l’on nous propose à la place de nous rendre à Montfort, étape sur la route de Saint-Main (Abbaye de St Méen le Grand). Mais quel est l’intérêt de se rendre à Monfort (p. 140) ? Or c’est sur ce segment que figure la pierre blanche, lieu-dit intégré au quatrain 20 Cent. IV. Dans ce cas, deux hypothèses : soit l’auteur a supprimé la référence à St Main, soit il l’a ajoutée, prolongeant ainsi la route de Monfort. Pour notre part, nous penchons plutôt vers une suppression plus ou moins heureuse. Autant, en effet, il apparaît comme légitime de conduire le lecteur dans un lieu isolé mais consacré, autant une telle information semble dérisoire s’il s’agit de se rendre dans un endroit qui n’a pas d’affectation particulière et qui ne saurait être une destination en soi ni un lieu de passage.

   Nous disposons désormais d’un nouveau corpus constitué des diverses éditions des Centuries, de celles de la Guide des Chemins de France et de l’unique édition des Voyages de plusieurs endroits ainsi que de la toponymie de la France et de l’Europe, au XVIe siècle, telle qu’elle est attestée par les cartes et les guides. Il ne fait pas de doute que l’ensemble de ces textes ont des éléments en commun mais il convient de déterminer les points de plus grande proximité. Sans prétendre aborder la question des éditions des Prophéties qui seraient les plus proches des productions de Charles Estienne, nous nous efforcerons de montrer que les quatrains s’apparentent, à certains détails significatifs, et en dehors de l’argument des villes étrangères, au texte des Voyages.

   On signalera également des variantes orthographiques entre la Guide et les Voyages comme au quatrain 37 de la centurie X :

Chambry Moriane combat sainct Iulian

Guide, p. 163 :
A sainct Iean de Morienne

Voyages, p. 31 :
Moriane

   Mais parfois l’orthographe varie d’une page à l’autre. Néanmoins, de tels détails pourraient nous aider à déterminer à quelle édition le rédacteur des Centuries fit appel.

   Il est remarquable par ailleurs que les Voyages s’ouvrent sur une liste de lieux figurant dans les quatrains, ce qui n’est pas le cas de la Guide.

Les sorties de Paris

   Les Centuries nous proposent deux issues pour quitter la capitale : par le Pont de Saint-Cloud en direction de Dreux (Eure et Loir) et le Pont Antony vers Orléans (Loiret).

   Direction Dreux :

   Nous avons affaire à une assez longue série de quatrains touchant à la même région, dans la centurie IX de puis le quatrain 56 jusqu’au quatrain 59.

56
Camp près de Noudam passera Goussan ville
Et à Malotes laissera son enseigne


57
Au lieu de Drux un Roy reposera
Et cherchant loy changeant d’Anathème


58
Au costé gauche à l’endroit de Vitry
Seront guettez les trois rouges de France


59
A la Ferté prendra la Vidame
Nicol tenu rouge qu’avoit produit la vie
La grand Loyle naistra que fera clame
Donnant Bourgogne à Bretons par ennuie

   On trouve chez Estienne la série : Houdan, Goussainville, Marolles, Dreux, Vitry (il ne s’agit pas de la ville de la banlieue parisienne, Vitry/Seine26, Rouges Maisons, La Ferté au Vidame.27 On pourrait voir dans Bourgongne une corruption de Notre Dame de Bolongne qui se trouve en tête de la série de la page 113 et dans Loyle, le Loir (Loyr), rivière qui arrose Vendôme, et qui donnera d’ailleurs son nom au département où se trouve La Ferté Vidame, chef lieu de canton : l’Eure et Loir.

Direction Orléans :

Voyages, p. 5 :
A Notre Dame de Cléry
Le bourg La Reine
Le pont Antony
Longjumeau
Linaz ou Montlehery
Chastres (Chastres sous Montlhéry et non Chartres)
Torfou
Estrechy le larron
L’hermitage
Estampes
Etc.

   Cette liste figure également dans la Guide et est largement reprise dans les quatrains, comme l’a bien signalé C. Liaroutzos, mais pas au début et ce qui est au début de la Guide n’a pas été retenu. Ainsi, celui qui ouvrirait en leur début les Voyages et qui connaitrait les Centuries aurait d’emblée un sentiment de déjà-vu.

IX 86
Du bourg Lareyne, parviendront droit à Chartres
Et seront pres du pont Anthoni pause
Sept pour la paix cauteleux comme martres
28
Feront entrée d’armée à Paris clause

IX 87
Par la forest du Touphon (Torfou) essartée
Par hermitage
29 sera posé le temple
Le duc d’Estempes (Etampes) par sa ruse inventée
Du mont Lehori (Montlhèry) prélat donra exemple

   L’exemple de quatrains consécutifs correspondant à une même région suffit, selon nous, à supposer une première rédaction des quatrains, non publiée, dans laquelle un ordre géographique aurait été respecté de bout en bout puis brouillé délibérément mais non systématiquement. De même, chaque quatrain, en principe, ne doit comporter que des lieux proches les uns des autres.

   En réalité, dans les Voyages, les banlieues ne sont mentionnées que comme la première étape d’un long voyage vers l’Italie, l’Espagne ou la Bretagne. Dans la Guide des Chemins de France, les horizons sont plus limités.

Les itinéraires

   Les quatrains toponymiques couvrent certains itinéraires de façon privilégiée sinon exhaustive : voyage de Paris à Rome (le plus simple), voyage à N.D. de Montserrat par Perpignan, voyage de Saint-Jacques de Compostelle à partir d’Orléans, voyage de St Main, au départ de Paris, par Orléans, en prenant la route de N. D. de Cléry, Voyage de St Julien de Vouvantes par Varennes au départ d’Orléans.30

Quatrains italiens

   D’une façon générale, le déchiffrage des toponymes italiens a été mieux mené que pour l’Espagne pour des raisons culturelles. C’est ainsi qu’à ce propos Le Pelletier, sous le Second Empire, fournit des commentaires pertinents :

I, 58
Fossen, Turin, chef Ferrare suivra

III, 56
Chef de Fossan aura gorge coupée

   Fossano : ville des Etats Sardes (pp 206 et 256).

IV, 73
Ferrare et Ast. Le Duc esprouvera

   Apocope : Asti, ville des Etats Sardes.

   Abordons l’Italie à travers la grille des Voyages de plusieurs endroits :

Direction Rome :

A Rome par le Mont Godard es Alemaignes (pp 57-58)

   Castel Franco-Robiera-Plaisance-Cosme sont les éléments constitutifs du quatrain suivant :

De castel Franco sortira l’assemblee
L’ambassadeur non plaisant sera scisme
Ceux de Ribière seront en la meslee
Et au grand goulfre desnieront l’entree

   Il s’agit là, probablement, avec le quatrain sur Varennes, d’un des plus célèbres et en tout cas des plus frappants du point de vue de l’exégèse nostradamique moderne qui y voit l’annonce de la guerre civile espagnole opposant le général Franco et Antonio Primo de Rivera, fondateur de la Phalange, mort en 1936.31 Serge Hutin commente ainsi : “Franco bafoue le régime républicain. Les partisans de Primo de Rivera se rallient à ses troupes”.32

   Il est intéressant de noter que le rédacteur des Centuries n’hésite pas à convertir des noms de lieux en noms communs : Plaisance devient plaisant et Cosme schisme.

VIII, 3
Au fort chasteau de Vigilanne & Resviers
Sera le puisnay de Nancy
Dedans Turin seront ards les premiers
Lors que du dueil Lyon sera transy


Voyages, p. 48 :
A Rome le plus court (chemin)

   A main droite, fort chasteau, Viglanne, Resmiers, Rivol.e, Turin. En revanche, Nancy apparaît ici comme un intrus33 mais cela est peut-être délibéré : Nancy évoque la Lorraine et les Guise.34

IX, 3
La magna vaqua à Ravenne grand trouble
Conduits par quinze enserrez à Fornase (Fornoue)
35
A Rome naistra deux monstres à teste double
Sang, feu, déluge, les plus grand à l’espace


Voyages, p. 53

IX, 4
L’an ensuyvant descouverts par deluge
Deux chefs esleuz,le premier ne tiendra

   Note : un lieu situé non loin de Magna Vaqua est ainsi nommé “Premier” et a pu marquer le quatrain suivant.

VIII, 12
Apparoistra auprès de Buffalore
L’haut & procere entré dedans Milan


Voyages :
“Entre au pays de Milannois. Buffalore, Milan”

IX, 54
Arrivera au port de Corsibonne
Près de Ravenne qui pillera la dame
En mer profonde légat de la Vlisbonne
Sous roc cachez raviront septante armes

   Corsibonne est bien une ville signalée dans les Voyages d’Estienne, non loin de Ravenne.36 Il ne s’agit nullement d’une invention du rédacteur des Centuries.37

Quatrains espagnols

   Deux voies : l’une par la côte méditerranéenne vers Notre Dame de Montserrat, l’autre par la façade atlantique, vers Saint-Jacques de Compostelle.

Pèlerinage de N. D. de Monserrat (Catalogne) :

Centurie VIII, Quatrain 22
Gorsan, Narbonne par le sel advertir
Tucham la grace Parpignan trahie
La ville rouge n’y voudra consentir
Par haute vol. drap gris vie faillie

   qui est à rapprocher des Voyages, p. 20.

Voyages :
Corsal (Coursan), Narbonne, Tuchiam (Tuchan38), La Grasse, Ville Rouge, Perpignan, Vaulx. A noter qu’avant Corsal, il est fait mention, dans les Voyages, d’un Nisse qui n’est pas celui de la Côte d’Azur (Nice). Rappelons que Perpignan et le Roussillon étaient alors sous domination espagnole. La destination finale figure au quatrain 26 de la centurie VIII :

De Caton es trouvez en Barcelonne
Mys descouvers lieu terrovers & ruyne
Le grand qui tient ne tient voudra Pamplonne
Par l’abbage
(sic) de Monserrat bruyne

   La mention de la destination finale de l’Abbaye de Monserrat telle qu’elle figure dans les Voyages nous conforte dans le rapprochement proposé, même si Pampelune, en haute Navarre39, un peu trop à l’Ouest, ne se trouve pas tout à fait sur la route.40

   Chemin de Compostelle :

   Signalons ce quatrain assez général mais qui n’en renvoie pas moins à l’Espagnen :

VI, 88
Un regne grand demourra desolé
Auprès de l’Hebro se seront assemblés
Mont Pyrénées le rendront consolé etc.

   Il s’agit bien de l’Ebre, fleuve qui passe à Pampelune.41

VIII, 85
Entre Bayonne & à St Jean de Lux (Luz)
Sera posé de Mars le promontoire
Aux Hanix d’Aquilon Nanar hostera lux
Puis suffoqué au lict sans adiutoire


VIII, 86
Par Arnani Tholoser Ville Franque
Bande infinie par le mont Adrian
Passe rivière, Hutin par pont la planque
Bayonne entrer tous Bichoro criant

   Voyages : Fin du Royaume de France, rivière de Hurin Arnany, Villeneufve, Toulouzette (à ne pas confondre avec Toulouse42, Ville Franque, Segove, Mont Saint-Adrian (p. 64).

X, 47
De Bourze ville à la Dame Guyrlande
L’on mettra sus par la trahison faicte
Le grand Prelat de Leon par Formande
Faux pellerins & ravisseurs deffaicte


Voyages A St Salvateur, pp. 65-67 :
“En cette ville est l’église de St Salvateur, il y a de la couronne d’espines, du laict e Dame etc”

   Cette phrase concernant Oviedo pourrait être à l’origine de la formule “Dame Guyrlande”, la guirlande étant ici la couronne et rime ainsi avec Formande43 villes d’Espagne avec Leon et Burgos (Bourze, Burges) mentionnées dans les Voyages. Si notre hypothèse est juste, Le rédacteur des Centuries aurait utilisé un commentaire d’Estienne dépassant nettement le cadre élémentaire de la géographie.

X, 48
Du plus profond de l’Espaigne enseigne
Sortant du bout & des fins de l’Europe
Troubles passant auprès du pont de Laigne
Sera deffaicte par bande sa grand troupe


X, 25
Voyages :
“pont de Laigue, Finiterre que l’on dit estre la fin de l’Europe” (p. 66).

   Là encore, le commentaire “fin de l’Europe” repris dans le quatrain ne figure probablement pas sur une carte.

Par Nebro ouvrir de Brisanne passage
Bien eloignez el rago fara muestra
Dans Peligouxe sera commis l’outrage
De la grand dame assise sur l’orchestra

   On retrouve l’Ebre avec Nebro (Hebro), Peligoux figure dans le pèlerinage à Compostelle.

Quelques arbitrages

   La toponymie permet d’arbitrer entre les variantes :

1.
X, 6
Sardon Nemans si hault déborderont (Editions Troyes)

   Ou :

Gardon Nismes si hault déborderont (Vrayes Centuries et Prophéties)

   Or, dans la Guide, on peut lire (p. 181) :

“Route de Montélimar à Nymes :
A costé de Nymes à trois lieues (…) voy le pont du Gard sous lequel passe la rivière de Gardon”

2.
Freins : Fréjus

   Freins, Antibor, villes autour de Nice, III, 8244

3.
V, 94
Brabant et Flandres, Gand, Bruges et Bologne

   Il faut lire Boulogne plutôt que la ville italienne45

4.
I, 20
Tours, Orléans, Blois, Angers, Reims & Nantes
Citez vexees par subit changement
Par langues estranges seront tendues tentes
Feuves, dars, Renes, terre & mer tremblement

   Il est hors de question désormais d’accepter la lecture “Reims” comme le propose Benazra, lequel, décidément, privilégie avec Varennes, la Champagne. On préfèrera évidemment Rennes bien que cette ville soit mentionnée au quatrième verset. mais y était-elle initialement ? N’aurait on pas introduit Rennes au quatrième verset au lieu d’un autre mot figurant au sein d’une série de noms communs ?

   Utilisation on le voit systématique de certains itinéraires, sorte de paraphrase allant au gré des rimes et utilisant également les observations introduisant les lieux. Cela dit, nous verrons que la mention de Toulouse, placée seule, dans deux quatrains, revêt une autre signification, dans un contexte bien postérieur au temps de Nostradamus46 celui de la Ligue.

Les Fleuves du Royaume

   Le texte ainsi nommé a d’abord paru avec les Voyages avant d’être joint à la Guide en 1553.

   Les Voyages ne prévoient qu’un itinéraire vers Amiens. En revanche, l’appendice consacré aux fleuves traite de la Meuse, de l’Escaut etc, citant au passage un certain nombre de villes ainsi traversées.

   Clébert propose Sologne :

   Salonne pourrait renvoyer ici à la Sologne. Il suffit pour cela de comparer les deux premiers versets du quatrain 21 de la centurie IX, avec le passage suivant des Voyages (voir la Guide d’Estienne, p. 106) :

Au temple hault de Bloys sacre Salonne
Nuict pont de Loyre, Prélat, Roy pernicant


“La conté de Blois tient de cette Beausse & comprend ce qui est vers la Sologne deca la rivière de Loire.”

   La centurie X fait un usage assez flagrant des “Fleuves”.

X, 50 :
La Meuse au jour terre de Luxembourg

   C’est le premier fleuve mentionné :

“La Meuse (...) le long de la Duché de Luxembourg” (Fleuves, 1553, pp. 218-219)

X, 52
Au lieu où Laye & Scelde se marient
(...)Au lieu d’Anvers où la crappe charient


Fleuves :
“Laye (..) entre dans Gand (..) se retire à Anvers, & à Bruges (...) Schelde (...) Le Liz” (1553, p. 220)

Le rédacteur à l’oeuvre

   Dans la mesure où le Livre des Saints Voyages couvre la très grande majorité des lieux mentionnés dans les Centuries, à la différence de la Guide, une fois de plus, il s’avère extrêmement périlleux de passer du niveau bibliographique à celui de la biographie. Il ne suffit pas qu’un texte puisse être rapproché d’un autre pour que l’on soit à même d’affirmer qu’il s’agit bien du texte qui a servi à réalisé ce dernier, du livre que le rédacteur des Centuries avait sur son bureau.47 Certes, le constat de convergences pouvait s’avérer convainquant mais il importait de vérifier si d’autres éditions ou d’autres développements du même auteur n’offraient pas des identités encore plus frappantes, sans parler d’une vérification plus aléatoire quant à la possibilité d’un imitateur d’Estienne, ce que la proximité des dates avec le début de la première édition des Prophéties ne rendait d’ailleurs guère envisageable. Or l’existence du travail de Bonnerot en 1936 comportant un reprint de la Guide puis le reprint du travail de 1936 par Slatkine-Champion en 1978, avec la mention (p. 10) du second volet - les Voyages - et des localisations en bibliothèque (p. 22) tant à Paris qu’en province, rendait cette tâche aisée.

   Bonnerot écrivait :

   “Le succès qui accueillit cette guide fut si vif que, avant la fin de l’année 1552, Estienne publia, toujours sans nom d’auteur, le second petit recueil qu’il avait préparé simultanément et qui était le complément et la suite logique du premier. Le titre (...) disait clairement qu’il s’adressait aux pélerins et leur indiquait les chemins à suivre pour aller aux divers lieux de pèlerinages etc.”

   Mais pouvait-on imaginer que, sous cette nouvelle présentation, le lecteur se verrait proposer peu ou prou le même texte mais avec quelques nuances qui le rapprocheraient encore plus de celui des Centuries ? On a là en effet un saisissant exemple d’économie de moyens de la part d’un auteur qui est à la fois libraire et qui présente la même marchandise ou peu s’en faut sous deux étiquettes différentes pour deux publics, l’un laïc, l’autre religieux. Il eut suffi que C. Liaroutzos s’intéressât un tant soit peu à la toponymie étrangère des quatrains et qu’elle suivît à nouveau la piste Estienne pour découvrir le véritable intertexte, probablement le principal, de la littérature nostrnostradamique. Bonnerot rappelle d’ailleurs que ces Guides utilisent sinon recopient des documents antérieurs.

Implications exégétiques

   Il semble bien que la démonstration “statistique” soit assez concluante. Les Centuries n’ont pas annoncé la fuite de Varennes en Argonne ni le gouvernement du général Franco et les détails mis en avant par les exégètes renvoient dans la plupart des cas à d’autres noms de lieux ou de rivières figurant dans les Voyages d’Estienne : pierre blanche, moine, vaultorte etc. A ce jeu de mots, il s’en est fallu de bien peu que Varennes ne figurât point dans un quatrain des Centuries, ce qui eût été assurément un manque à gagner pour la gloire du Mage de Salon. La façon dont les devises pseudo-malachiennes furent conçues (voir Livre I sur la chèvre et l’auberge, pour Picolomini) a du plus d’une fois substituer à l’information principale une donnée plus marginale.

Un atlas onirique

   R. Benazra s’est évertué à dessiner une carte de France comportant les emplacements des villes - du moins certaines d’entre elles - figurant dans les quatrains. Exercice ô combien périlleux quand on considère que plusieurs villes portent le même nom en transcription française. C’est pourquoi il n’est pas possible de séparer villes de France et villes étrangères dans la mesure où il faut s’assurer que tel nom n’est pas aussi attribué à une ville hors des frontières géographiques de la France. Ainsi Verseil désigne-t-il Versailles ou une ville italienne ?

   A la page 25 des Voyages, nous trouvons Verseil sur la route qui conduit à Notre Dame de Lorette (en italien Loreto) et il existe un “pays du Verselois”. Curieusement, le lieu qui précède Verseil se nomme Saint-Germain, ce qui pourrait faire croire que nous sommes en Ile de France alors que l’on est entre Turin et Milan.48 Si l’on regarde sur une carte moderne, l’on trouve en effet “Verceil”.

Centurie, I, 6.
L’oeil de Ravenne sera destitué
Quand à ses pieds les aisles failliront
Les deux de Bresse auront constitué
Turin, Verseil que Gaulois fouleront

   Ici Bresse est, d’après le contexte, une francisation de Brescia, à l’Ouest de Milan, ce qui porte également à confusion en raison de la région française du même nom.49

   L’exotisme des quatrains tiendrait à cette toponymie massive qui est coutumièrement archaïque et n’appartient pas à la langue courante50 même si elle est parfois compensée, ce qui est source de confusion, par un terme francisé et qui appartient par ailleurs à la toponymie française. L’usage conservé des majuscules pour la première lettre des noms propres permet de distinguer ceux-ci des noms communs, sauf en début de verset, le rédacteur des Centuries ne cherche pas à changer par exemple Fougères en une plante en supprimant sa majuscule. Dans le quatrain sur Varennes, Reines est écrit avec une majuscule et sans être précédé d’un article; en revanche, “le moine noir”, lieu-dit, s’écrit uniquement avec des minuscules, sauf en début de verset. Tout se passe comme si l’on voulait souligner le nombre des noms propres, il ne s’agit pas, pour l’auteur, de gommer ce facteur.

   Ainsi, s’il est vrai que l’astronomie rend compte de la présence de noms de planètes et de signes zodiacaux, la géographie est la clef de toute une nomenclature, encore plus abondante dont se gausse un Pierre Petit, dans sa Dissertation sur les Comètes de 1665 (Cusson) :

   “Quand je vois des personnes admirer quelquefois la rencontre de certains quatrains avec quelques événemens singuliers (…) je m’étonne de leur admiration. S’ils avaient bien considéré que ce fou a fait entrer dans ses méchans vers sans rime et sans raison tous les noms des pays, des villes, des maisons & des grandes familles qui sont en Europe et principalement en France et qu’il en a fait des galimathias qui ne signifient rien et qui signifient ce que l’on veut quand quelque chose est arrivée etc.”51

   Est-ce que tous ces noms font partie du discours prophétique des Centuries ou n’en sont que la décoration ? Le fait que l’on trouve dans les Centuries une géographie presque complète de la France finit par neutraliser son caractère prophétique. Mais en est-il de même pour les passages astrologiques lesquels, finalement, ne font peut être pas plus sens ? Un atlas dans une main, des Ephémérides dans une autre, Estienne et Leovitius...

   Est-ce que le prophétisme s’articule sur ces noms propres ou bien se niche-t-il à côté, dans les espaces restés vides ? Encore faudrait-il pour appréhender ceux-ci que l’on ait tout à fait repérés ceux-là.

   Le principal apport des recherches de Chantal Liaroutzos n’est pas tant d’avoir identifié un certain nombre de villes connues mais d’avoir montré, grâce au recours à Charles Estienne, que des lieux-dits dont les noms n’évoquent même pas nécessairement des toponymes avaient été intégrés par le rédacteur des Centuries. Si l’auteur s’était contenté de cités bien repérables, on aurait pu penser à une sorte de démarche oraculaire annonçant pour chaque région un certain destin mais le fait d’avoir intégré divers éléments annexes et sans importance au niveau géopolitique nous invite à penser que l’enjeu était également lié à une quête de signifiants voués à une certaine transmutation prophétique : le rédacteur des premières Centuries et ses émules n’ignoraient probablement pas les méandres de la polysémie des noms, communs ou propres.

Apports toponymiques extérieurs aux Voyages

   L’on n’épuise pas la toponymie nostradamique avec les ouvrages d’Estienne. Il semble notamment qu’il ait ajouté d’autres villes. Il en est ainsi en Provence, comme l’a montré l’Aixois J. Ch. de Fontbrune52 :

III, 99
Aux champs herbeux d’Alein et de Varneigue
Au mont Lebron proche de la Durance

   Fontbrune indique en note :

   “Alleins : commune des Bouches du Rhône. Près d’Orgon
Vernégues : commune des Bouches du Rhône
Lubèron ou Léberon : montagne de la France méridionale au dessus de la vallée de la Durance.”

Une certaine unité toponymique

   La diversité des toponymes porteurs de traces linguistiques souvent très anciennes et très diverses doit, selon nous, être compensée par une certaine homogénéité du signifié, c’est à dire de la région concernée.

   D’emblée, force est de constater que le recours à la toponymie marque l’ensemble des centuries alors qu’il est faible dans les sixains.

Ex : Sixain 52
La grand Cité qui n’a pain à demy
Encore un coup la sainct Berthelemy
Engravera au profond de son ame
Nismes, Rochelle, Geneve & Montpellier
Castre, Lyon, Mars entrant au Bélier
S’entrebattront le tout pour une Dame

   Une toponymie - on parle dans la préface à César de ses “topographies” - en réalité bien éclectique, toute la France y passe, les villes étant par trop dispersées, combinée avec une image astronomique. Ce sixain est une caricature maladroite du style postnostradamique.

   En effet, les centuries “médianes” que nous appelons ligueuses font cohabiter sinon dans le même verset, du moins dans le même quatrain des lieux par trop éloignés. Que la dimension géographique n’ait point échappé aux rédacteurs de ces centuries, cela ne fait guère de doute, qu’ils aient puisé dans les oeuvres d’Estienne n’est pas évident : une carte a pu leur suffire pour conférer à leur production un profil nostrnostradamique. Toujours est-il que la progression n’est qu’à moitié satisfaisante, le processus d’imitation n’ayant pas été mené avec assez de rigueur.

   Le rédacteur des Centuries a pris la peine d’emprunter non seulement des noms de lieux mais quelques formules qui n’appartiennent qu’à la présentation d’Estienne. Et ce faisant, il devenait sinon inimitable du moins identifiable en dépit des apparences. Peut-être était-ce là, au fond, son but en se penchant sur les Saints Voyages. En d’autres termes, les quatrains qui ne seraient pas de la première édition, quand bien même feraient-il appel à la toponymie, n’offriraient point la spécificité propre à l’arrangement d’Estienne.

Une veine à imiter

   Les imitateurs des premières Centuries parues ont certainement cherché à truffer leurs quatrains d’une même géographie. C’est ainsi que le quatrain 57 de la centurie V est inspiré selon nous de X, 29 et de IV, 2753 dans les trois cas, il est question de Saint-Rémy et de ses environs, notamment de Saint-Paul de Mausole, avec le mausolée de Sextus :

7
Salon, Mansol, Tarascon de Sex, l’arc

X, 29
De Polmansol dans caverne caprine

V, 57
De Sext, mansol faillir la renommée

La géographie de Guillaume Postel

Guillaume Postel

Guillaume Postel

    Il existe plusieurs explications pour rendre compte d’une telle présence géographique dans les Centuries. Mais il est peut-être bon de souligner l’intérêt qu’un Postel manifestait pour cette discipline. On lui doit ainsi La vraye et entière description du Royaume de France et de ses confins, avec l’adresse des chemins & distances aux Villes inscriptes es Provinces d’iceluy, ouvrage dédiéà Charles IX et comportant une épître datée du “dernier jour d’octobre 1570”, signée Guillaume Postel, cosmographe. Qui sait si cette très belle carte de Postel ne constituerait pas une source de la géographie des Centuries ? Signalons que dans l’ouvrage de Bonnerot, de nombreuses cartes ont été heureusement insérées. Nous avons pu en tout cas constater qu’une source peut en cacher une autre et que l’on ne peut jamais exclure qu’il n’existe une source plus proche du texte étudié. Trop souvent, l’on se satisfait d’une source lointaine, ce qui génère quelque anachronisme. On sait ainsi que la source des deux premiers quatrains des Centuries a été déterminée à la suite d’essais successifs à telle enseigne que lorsque la source la plus proche a été trouvée, on s’aperçoit souvent que ce que l’on avait cru être l’apport de l’auteur considéré était déjà présent dans l’ouvrage dont il se servait. Se contenter de sources éloignées, c’est donc bien souvent risquer d’attribuer à un auteur des initiatives qu’il n’a pas prises voire dont il n’était même pas conscient. Si identifier des sources - mais encore faut-il savoir ce qu’a de provisoire une telle recherche - peut permettre de dater un texte en fournissant un terminus a quo, il est toutefois bien entendu qu’une source peut être utilisée avec un certain délai alors qu’elle ne peut l’avoir été après la parution du texte considéré. Il est essentiel de déterminer la source immédiate car elle est susceptible de comporter d’autres éléments intéressants pour la compréhension du texte étudié que le seul point qui nous a fait la rechercher au départ. Une source peu pertinente se limite souvent au dit point, une source qui l’est davantage est un fil d’Ariane, permettant toute une série de recoupements, par delà ceux auxquels on songeait, répondant ainsi à des questions que l’on ne se posait même pas. Sans parler du fait qu’un rapprochement par trop ponctuel risque fort d’être aléatoire et c’est bien entendu le cas en ce qui concerne les quatrains qui peuvent souvent se lire au travers de diverses grilles historiques. Ajoutons que dans le cas d’emprunts ou de plagiats, il est bien improbable qu’un auteur ait recouru à des dizaines de sources diverses et qu’il convient que chaque source proposée soit polyvalente et qu’il y ait été puisée à plusieurs reprises.

Jacques Halbronn
Paris, le 28 janvier 2005

Notes

1 Cf. “Les prophéties de Nostradamus : suivez la Guide”, Réforme, Humanisme, Renaissance, 1986. Retour

2 Voir Deweer, art. “Nostradamus” in Bulletin de la Société Astrologique de France, Paris, 1992. Retour

3 Cf. Advertissement à Nosseigneurs les protecteurs de la cause juste, le Parlement de Paris, contenant le changement & renovation de Paris, prédit par Michel Nostradamus, Septiesme partie, Paris, 1652, BNF, Lb37 2618 et in recueil des Prophéties Mazarines, Paris 1652, p. 102, Ars. 8°S 14343. Retour

4 Septiesme Partie (Advertissement), op. cit. Retour

5 Voir Jean Bonnerot, La Guide des Chemins de France de 1553 par Charles Estienne, Paris, Champion, 1936, Reed, Paris, Slatkine, 1978. Retour

6 L’ouvrage de Bonnerot comporte le fac simile de l’édition de 1553 “revue et augmentée pour la troisiesme fois”. Retour

7 Dumézil connaît les Centuries à travers les Oracles d’A. Lepeltier, parus sous le Second Empire (cf. infra). Retour

8 Notons que Varennes se trouve dans la centurie IX, ce qui paradoxalement authentifie celle-ci comme due, du moins pour ce qui est de ce passage, à Michel de Nostredame, car se servant des mêmes sources que les premières, à savoir les Voyages d’Estienne. Retour

9 Voir l’aricle C. Bartoli, in Lire Nostradamus autrement, Spéracèdes (06), Tac Motifs, pp. 23-24. Retour

10 Voir M. Marin, Nostradamus, Paris, J. Granger, 1998, p. 53 qui cite ce quatrain sans prendre aucunement en compte le contexte breton. Retour

11 Ce qui n’empêche pas Clébert, op. cit., de proposer parfois des toponymies étrangères au quatrain. Parfois, Bresse correspond à la Bresse, parfois à Brescia, alors que dans les deux cas le contexte est italien. Retour

12 On utilise ici le texte de l’édition troyenne de Chevillot. Retour

13 Cf. Nostradamus, mode d’emploi,. La clé des prophéties, Paris, Lattés,1981. Retour

14 Nostradamus est par ailleurs lecteur de Froissart, comme il le note dans les Significations de l’Eclipse de 1559. Or Froissart décrit, dans ses Chroniques, ce qui arriva à Charles VI dans la “forêt du Mans”, à savoir qu’il y connut un premier accès de folie. Peut-être y a-t-il quelque association ? Retour

15 On utilisera le découpage administratif moderne pour nous repérer. Retour

16 Cf. “Répertoire des lieux géographiques dans les Centuries de Nostradamus”, in Cahiers Michel Nostradamus, Lyon, Juillet, n° 4, 1986, p. 59. Retour

17 Brind’amour (1996), dans son édition des Prophéties de 1555, ne semble pas avoir recouru à la Guide d’Estienne. Retour

18 La présence du sud ouest est en fait largement due à la période de la Ligue, voir Halbronn 1998.1. Retour

19 Clébert, 1993, p. 178, n’a pas utilisé la Guide et est donc conduit à des spéculations sur le sens de la formule dans ce quatrain. Retour

20 Dans l’étude de Bonnerot (1936), figure, p. 142, en majuscules la ligne suivante qui aurait pu alerter plus d’un nostradamiste avant Chantal Liaroutzos, “à RENNES, depuis MAYENNE, par ERNEE et FOUGERES”. Retour

21 Voir B. Arsenal, Res 8° H 5169 (2). Retour

22 1ère Ed., BSG, Deuxième édition de 1552, BNF. Une erreur s’est glissée au catalogue des Imprimés de la BNF qui donne pour supplément au titre de la deuxième édition de la Guide, en 1552, les “Fleuves du Royaume”, intitulé qui n’apparaît qu’en 1553. Retour

23 Voir Fordham, op. cit. Retour

24 Il est à noter que B. Rigault et Barbe Regnault, chez qui Nostradamus fait paraître des ouvrages, publieront la Guide des Chemins de France, Bonnerot, 1936, Tome I, pp. 14-15. Retour

25 Estienne ne s’intéresse pas à un pèlerinage décrit par Froissart dans ses Chroniques, qui concerne Notre Dame de Boulogne, où le roi de France Jean II le Bon notamment s’arrêta lors de son retour en Angleterre. Retour

26 Ni de Vitry le François. Voir Fontbrune, 1980, p. 113. Retour

27 Voir C. Liaroutzos, 1989, p. 38. Retour

28 Montmartre peut-être. Retour

29 La Guide, p. 99 : Le bourg la reine, le pont Antony, Longjumeau, Montlehery, Chastres (sous Montlehery), Torfou, La forêt de Torfou, Estrechy le larron, L’hermitage, Estampes. Retour

30 Cette présence de lieux portant le nom de Notre Dame n’est pas sans lien avec le nom même de Nostradamus, qui signa d’abord Nostra Domina. Retour

31 Fontbrune, 1980, p. 271, ne fait ici aucune référence à la toponymie italienne qu’il avait pourtant exploitée pour d’autres quatrains, notamment en identifiant magna vaqua. Retour

32 Voir S. Hutin, Les prophéties de Nostradamus, Texte intégral et authentique des Centuries expliquées et commentées jusqu’en l’an 1999, Paris, J’ai Lu, 1982, p. 280.Voir S. Hutin, Les prophéties de Nostradamus, Texte intégral et authentique des Centuries expliquées et commentées jusqu’en l’an 1999, Paris, J’ai Lu, 1982, p. 280. Retour

33 Voir IX, 18. Retour

34 Clébert, 1981, ne semble pas avoir travaillé avec une carte d’époque qui francise les noms étrangers, ce que la lecture d’Estienne permet. Concernant Nancy, voir notre étude de IX, 18. Retour

35 Fontbrune, 1980, p. 236, y voit un anagramme. Charles VIII y gagna une bataille en 1495. Retour

36 P. Spore, qui ne se sert pas des ouvrages d’Estienne n’a identifié ni Corsibonne ni Buffalora. Retour

37 “mot fabriqué par Nostradamus pour désigner la République” Fontbrune, 1980, p. 314. Retour

38 Pour Fontbrune, 1980, p. 485, qui par ailleurs a bien déchiffré les autres toponymes : révolte des Tuchins, sorte de jacquerie. Retour

39 Il semblerait que Nostradamus, dans sa recomposition, ait interverti Pampelune et Saragosse. En effet, Pampelune est à peu près sur la route de Compostelle et Saragosse n’est pas si loin de l’abbaye de Montserrat. Retour

40 Fontbrune, 1980, p. 91, n’hésite pas à voir dans Monserrat “l’ancien duché d’Italie” Montferrat, ce qui trahit un certain manque de rigueur sinon toponymique du moins géographique. Retour

41 Fontbrune, 1980, y voit une référence à Hébron, en Palestine, p. 386. Retour

42 J. Ch. de Fontbrune, 1980, pp. 447-448: “Depuis l’Ombrie jusqu’à Toulouse et Villefranche etc” Hutin: dispute, lutte, mêlée. Mont Adrian : les montagnes de Yougoslavie et d’Italie. La dimension espagnole n’a pas été perçue en dépit de la présence de Bayonne. Retour

43 Rien à voir avec Formantera aux Baléares comme le suggère Clébert, 1981. Retour

44 S. Hutin, 1982, pp. 76-80, a proposé un certain nombre de corrections. L’auteur écrit à propos du verset déjà étudié “Passe rivière, Hutin, par pont la planque”: “On pourrait imaginer aussi Nostradamus ayant pressenti le nom de l’un de ses commentateurs” (p. 76). Retour

45 Voir Fontbrune, 1980, p. 435, “Ville d’Italie, la plus importante de la Romagne. ”. Retour

46 Voir Halbronn, 1998.1. Retour

47 Il serait évidemment intéressant de retrouver l’exemplaire éventuellement annoté par l’auteur. Bonnerot signale celui de la B. M. d’Amiens, Fonds Lescalopier 4799 et, à Paris, outre celui de l’Arsenal, celui de la BSG, Res L 16 Inventaire 63, mais l’on pourrait probablement en trouver d’autres en recherchant de façon systématique. Les deux volumes de Charles Estienne ont désormais leur place dans la bibliographie nostrnostradamique. Retour

48 Benazra, op. cit., a bien rendu Verceil. Retour

49 Voir Fontbrune, 1980, p. 234. Retour

50 Voir Benazra, Etude sur les noms de lieux, in Cahiers Nostradamus, op. cit., et Benazra. Retour

51 Cité dans la Bibliothèque de La Croix du Maine et de Du Verdier. Retour

52 Cf. Nostradamus, historien et prophéte, Monaco, ed. Du Rocher, 1980, p.461. Retour

53 Voir Marie Marin, Nostradamus, le prophète de la Renaissance, Paris, J. Granger, 1998, pp. 21-23 ; cet auteur y aborde notamment (pp. 60-62) la question de l’inspiration égyptienne de certains quatrains. Retour



 

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