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ANALYSE

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Le labyrinthe des éditions centuriques “Rigaud”

par Jacques Halbronn

    Combien y a-t-il eu d’éditions des Centuries signées Benoist Rigaud ou attribuées à ce libraire lyonnais ? Combien en a-t-on conservé, combien en manque-t-il ? Qu’est ce qui s’est passé en 1568, deux ans après la mort de MDN, pour que la plupart des éditions portant ce nom soient datées de cette année là ? Ajoutons à cela le cas des éditions datées de 1566, année de la mort de MDN, et portant, par erreur, le nom de Pierre Rigaud au lieu de celui de Benoist.

   La première attestation dont nous disposions, dans le temps, d’une édition Benoist Rigaud nous est fournie par Duverdier, dans sa Bibliothèque (1585), il mentionne une édition à dix centuries de quatrains (????), parue chez Benoist Rigaud, et portant l’année 1568. Pour nous, une édition à dix centuries n’a tout simplement pas pu paraître en 1568, nous avons montré que les centuries V à VII ne sont très probablement pas parues avant 15721 et de même une Epître à Henri II traitant d’une miliade de quatrains n’est pas concevable sans qu’il y ait eu une édition à dix centuries, ce qui situerait une telle Epître à la miliade entre 1572 et 1584, étant bien entendu qu’une première Epître centurique à Henri II en date de 1558 est attestée par Crespin, au début des années 1570. Ce qui nous conduit à penser qu’une édition à 10 centuries, avec l'Epître centurique à la miliade a du paraître avant 1584, portant le nom de Benoist Rigaud, à Lyon, et se référant à l’an 1568. C’est d’ailleurs alors que l’on passa de sept (I-IV & VIII-X) à dix centuries (I-X), la fonction de l’Epître à la miliade ayant justement été de légitimer la présence des Centuries V à VII. Encore, convient-il de revenir sur l’ingéniosité du procédé.2

   En faisant dire à MDN qu’il achevait avec ce lot de Centuries qui suivait l’Epître au Roi, on laissait entendre que les Centuries VIII à X étaient nouvellement arrivées. Or, ce n’étaient pas ces centuries là qui étaient inédites d’autant que nous savons qu’on les connaissait avant 1572. Les Centuries nouvelles étaient celles qui avaient été ajoutées après la centurie IV, soit V, VI et VII, inconnues avant 1572, mais globalement on arrivait bien à une miliade. Tour de passe passe !

   Mais affirmer cela signifiait que ces centuries V-VII étaient déjà parues et on peut d’ailleurs se demander quel intérêt il pouvait y avoir à affirmer une chose pareille. On ne saurait cependant être surpris tant on sait que la stratégie du prophétisme consiste, paradoxalement, à reculer dans le passé pour transformer le présent en futur. Voilà donc des quatrains fort récents, ceux des Centuries V-VII qui se retrouvent ainsi marqués par la patine du temps. Etant donné que la première épître centurique au roi datait de 1558, et que cette date ne serait pas à nouveau retouchée, il fallait donc bien que ce fut avant 1558 que fussent parues les sept “premières” Centuries. Il semble en effet que ce soit à cette époque, déjà éloignée de celle de MDN, que l’on ait commencé à abandonner la thèse des publications posthumes. Cela est attesté par La Croix du Maine, dans sa Bibliothèque (1584) qui est jumelle de celle de Du Verdier, lequel signale une édition datée de 1556, parue chez Sixte Denyse, à Lyon. R. Benazra demande à ce sujet3 “s’il s’agit de la première édition composée à sept centuries qu’Antoine du Rosne devait copier l’année suivante ?” Pour nous, en tout état de cause, il s’agit d’une édition antidatée. Quant à celle d’Antoine du Rosne, tout aussi antidatée, à 1557, cette fois, elle serait plus tardive puisqu’elle comporte une Centurie VII incomplète4, elle daterait du début des années 1590. Mais à ce jeu là, on pourrait aussi supposer une édition contrefaite à 4 centuries chez Sixte Denyse, antidatée à 1556 et une autre, à sept centuries complétés, datée de 1568, au sein de la miliade, dans une édition antidatée de 1568, chez Benoist Rigaud. Ces deux éditions seraient parues au début des années 1580, chez Benoist Rigaud, avec la mention 1568.

   On peut aussi se demander si cette édition signalée par Du verdier comportait la préface à César ou seulement l'Epître à Henri II, voire si elle comportait le “Brief Discours sur la vie de Michel de Nostredame”. On notera, comme on l’a déjà signalé5, cette préférence quand on parle de l’homme et non pas de l’oeuvre pour “Michel de Nostredame” au lieu de “Michel (de) Nostradamus”, expression plus vague et qui peut englober éventuellement plusieurs auteurs (dont notamment Mi. De Nostradamus le Jeune) se revendiquant d’un certain courant, le nostradamisme, un prophétisme à la française. Très probablement puisque cette Préface figure en 1588 dans les éditions parisiennes et rouennaises.

   Arrêtons-nous sur les deux éditions rouennaises conservées, encore que faisant partie de la Bibliothèque Ruzo, dont le sort reste incertain et dont on ne connaît le contenu que par la description que le collectionneur péruvien en a donné.6 Coup sur coup ou parallèlement parurent à Rouen une édition à quatre centuries et une autre comportant une addition correspondant grosso modo aux centuries suivantes (V-VII).

   L’édition à 4 centuries est tout à fait significative : pourquoi existerait une telle édition, plus de trente ans après celle de Macé Bonhomme, 1555, alors qu’entre temps serait parue en 1557 et surtout en 1568 des éditions où la IVe centurie est englobée au sein d’un volet de sept centuries ? Force est de constater que les Grandes et Merveilleuses Prédictions de M. Michel Nostradamus divisées en quarte (sic) Centuries, parues en 1588, chez Raphaël du Petit Val, rendent extrêmement improbable voire inconcevable la parution de 1555 de quatre centuries, dont le contenu est à peu près identique, à quelques quatrains près. A moins d’avoir précieusement conservé une édition antérieure à 1557. Or, un tel scénario est d’autant plus improbable que l’année suivante, 1589, paraissent chez le même libraire de Rouen, et sous le même titre une édition augmentée dont il en y a (sic) trois cens qui n’ont encores iamais esté imprimées.7

   Nous pensons que la première édition à 4 centuries, avec ou sans la Préface à César, pourrait dater de 1568, chez Benoist Rigaud et que c’est autour de celle-ci que s’est constituée, au début des années 1580, l’édition à la miliade, portant également la mention Benoist Rigaud, 1568, par adjonction du volet à l’épître à Henri II, précisément, comportant cette référence à 1000 quatrains mais aussi par adjonction de nouvelles centuries, jamais encore parues, permettant de parvenir à ce chiffre. Nous avons montré ailleurs que l’intitulé des éditions Antoine du Rosne 1557, à sept centuries, comportait la même formule impropre ou en tout cas assez spécifique au titre : “dont il en y a” au lieu de “dont il y en a” que dans l’édition rouennaise de 1589. Tout se passe comme si nous avions là coup sur coup deux états : l’édition à quatre centuries aurait continué à circuler depuis 1568 puis paraît une édition à dix centuries, reprenant la déjà ancienne édition avec l'Epître à Henri II et trois centuries, parue avant 1572, selon le témoignage de Crespin (cf. supra). Mais alors pourquoi, à peine quelques années plus tard, en 1588 - 89, aurait-on éliminé, à Rouen, la dite Epître, ses centuries (VIII-X) et ipso facto le projet de la miliade, laquelle visait précisément, selon nous, à légitimer la présence des Centuries V-VII ? On ne peut expliquer un tel balancement que par des considérations politico-religieuses, ce qui ne saurait surprendre quand on n’oublie pas les liens viscéraux existant entre le politique et le prophétique. Le fait est que les éditions parisiennes de 1588 - 89 ainsi que l’édition anversoise de 1590, les unes et les autres appartenant au camp catholique, excluent ce second volet qui épouse le parti réformé.

   Mais comment expliquer que la Centurie IV de l’édition de Rouen à quatre centuries, - noter que la mention “4 centuries” n’apparaît pas au titre de l’édition Macé Bonhomme 1555 - selon nous la plus ancienne édition conservée, non antidatée, de cet état, ne soit pas complète, à 100 quatrains et qu’elle le soit devenue l’année suivante ?

   Selon nous, entre c1584, date de l’édition à la miliade, et 1588, un processus de censure est intervenu, dont la seule manifestation ne fut pas la mise à l’écart de trois centuries (VIII-X). En fait, il semble que la meilleure explication soit celle-ci : l’édition à 4 centuries pleines avait été censurée dès avant l’édition à la miliade, laquelle allait rétablir une centurie IV pleine, pas forcément sous sa forme originelle. Il est possible que l’édition Macé Bonhomme corresponde à cette édition censurée pré-miliade et donc date d’avant 1584. Il est d’ailleurs probable que c’était plutôt une édition Sixte Denyse 1556 (cf. supra) suivie (sic) d’une édition Macé Bonhomme 1555 qui pourrait dater de 1589 - 1590.8

   L’édition Benoist Rigaud à la miliade vient donc non seulement restituer une Centurie IV complète mais en profite pour en ajouter 300 de plus, ce qui exclue que la Centurie VII ait été alors incomplète. Cette édition aurait donc ajouté 347 quatrains pour parvenir à 1000 unités. L’idée que l’on aurait voulu maintenir une centurie VII incomplète en lieu et place d’une centurie IV incomplète nous paraît décidément fort improbable, d’autant que cela ne constituerait pas pour autant, stricto sensu, une addition de 300 quatrains, car 47 quatrains à la IV plus 40 / 42 quatrains à la VII ne totalisent pas 100. Nous avons par ailleurs expliqué que la “nouvelle” centurie VII était liée à l’annonce de 39 articles s’ajoutant aux six centuries “pleines”. Contrairement à ce que note R. Benazra, à propos de l’édition rouennaise tronquée de 15899, nous pensons que cette édition pourrait n’avoir comporté que six centuries. En tout état de cause, il y eut certainement une édition à six centuries pour qu’ensuite il soit question d’une addition de 39 articles et la présence du quatrain latin (Legis cautio) à la fin de la VI ainsi que la question du quatrain 100, à la fin de la dite centurie - témoigne dans ce sens.

   Il reste que désormais, sous le règne de Henri IV et sous la Régence de Marie de Médicis, la référence restera à l’édition Benoist Rigaud 1568, la question étant celle de son contenu. Le fait est aussi que nous disposons d’un grand nombre d’éditions s’y référant, dans leur titre, comme celle de 1605 ou comme étant tout simplement datées de 1568, comme celle reprintée par M. Chomarat (2000). En fait, tant le canon type MDR troyen (avec présages) que le canon lyonnais (sans présages) se veulent restituer l’édition BR 1568.10

   En réalité, il a du exister une autre édition BR 1568 - non retrouvée - ou qui se référait à une telle édition, c’est celle dont s’est servi le Janus Gallicus (1594) et qui comportait ces présages dont il y est fait le commentaire partiel. C’est de cette édition que relève la série MDR sur laquelle viendront ultérieurement se greffer les sixains.

   Pour nous résumer, nous sommes en présence de quatre types d’éditions BR :

      - un premier type à quatre centuries, paru effectivement en 1568. Nous avons une édition à 4 centuries, Rouen 1588 et une édition antidatée de 1555 mais ni l’une ni l’autre ne se réfèrent à BR 1568.

      - un deuxième type à dix centuries, sans les présages, paru vers 1584, attesté par Du Verdier (cf. supra) et se présentant comme paru à Lyon, en 1568, chez BR.

      - un troisième type à dix centuries, dont la VII incomplète, et avec Présages, paru vers 1593, attesté, implicitement, par le commentaire qui en est fait dans le Janus Gallicus et dont nous avons une édition tardive datée de 1605, se référant à BR 1568, et d’autres non datées, sans parler des éditions hollandaises des 1667 - 1668.

      - un quatrième type11, ne comportant pas les Présages, avec une centurie VII incomplète.

   Avec les types 3 et 4 , il nous semble que la référence est au type 2, à dix centuries, BR 1568. Le type 3, cependant, comporte des Présages qui ne figuraient vraisemblablement pas au type 2.

   En tout état de cause, ni le type 3 ni le type 4 ne correspondent à ce qui parut réellement en 1568, chez BR, et qui se réduisait selon nous au type 1. Reste évidemment le problème de l’autre groupe de centuries, précédé d’une première version de l’Epître centurique à Henri II, attestée par Crespin (cf. supra) et qui dut paraître indépendamment, à la même époque. En pratique, la référence serait donc bel et bien l’édition BR à la miliade du début des années 1580 dont Du Verdier salua l’existence en 1585, année qui figure dans l’Epître centurique à Henri II, sous une forme qui ne nous a été conservée qu’avec l’addition plus tardive renvoyant à 1606.12 Cependant, on peut se demander si le Janus Gallicus en incluant les Présages dans son système exégétique n’a pas consacré le type 3, en tant que nouveau canon, l’étape suivante - adoptée par le MDR - étant celle de l’inclusion d’une troisième épître centurique, dédiée à Henri IV, introduisant les sixains.13 On rappellera que la Bible, notamment pour l’Ancien Testament, comporte divers canons, dont les pièces retenues ne sont pas les mêmes, selon les obédiences juive, catholique, protestante etc.

   Que dire de la vogue de l’édition Pierre Rigaud 1566, introduite par des faussaires du XVIIIe siècle et consacrée au siècle suivant par un abbé Torné Chavigny notamment avec son Histoire prédite et jugée par Nostradamus. Texte de l’édition de 1566, à Lyon par Pierre Rigaud etc, Bordeaux, 1860.14 Cette édition est très proche du type 4, elle ne comporte ni présages, ni sixains mais elle a un avantage sur les contrefaçons BR 1568 de type 4 de comporter les inscriptions de la pierre tombale, sise chez les Cordeliers de Salon de Provence, soulignant ainsi le caractère posthume de l’ensemble, ce que le type 4 BR 1568 tend à occulter. On peut y voir une initiative des éditeurs avignonnais du Siècle des Lumières ou bien la réminiscence d’une ancienne présentation. Ce qui pose la question de l’époque du passage de la thèse “posthume” à la thèse “du vivant” de MDN et qui nous semble, au même titre que la question des centuries complétés et incomplètes, un enjeu majeur de la critique nostradamologique.15 C’est d’ailleurs un point de divergence entre les canons : l’un le type 3 MDR tendrait à préserver le caractère posthume de l’oeuvre centurique - les quatrains des almanachs étant eux-mêmes extraits non pas des almanachs eux-mêmes mais d’un recueil manuscrit16 tandis que l’autre le type 4 conduirait à renforcer, implicitement, l’idée de publications de MDN de son vivant.

   Ce caractère posthume fut donc gommé.17 On en a une expression remarquable avec l’édition MDR parue sous la Fronde, vers 1649, avec un quatrain comportant l’anagramme de Mazarin et portant la date de 1568, Nostradamus étant habilement présenté comme “médecin du Roy Charles IX”, les rois précédents n’étant plus mentionnés. Ce faisant, on crut produire, assez gauchement tout de même, une édition d’époque, Charles IX étant le souverain régnant en 1568. Mais en 1568, MDN est mort et donc toute édition datée de cette année est ipso facto posthume, sauf que l’absence de toute mention posthumique nous semble bien anormale et que ce n’est pas par hasard que ce soient les mêmes qui défendent l’édition type 3 BR 1568 et les éditions 1555 et 1557. La question est au demeurant de déterminer de quand datent vraiment ces éditions supposées parues du vivant de MDN et est-ce que ce n’est pas lié au problème de la Préface à César.18

   Le témoignage le plus ancien de la présence de la dite Préface en tête de Centuries date de 1588, avec l’édition rouennaise à quatre centuries dont une, la IVe, incomplète19 et dont nous avons dit qu’il reprenait probablement une édition pré-miliade (donc avant le début des années 1580). Mais même la présence de cette Préface ne constitue pas nécessairement un marqueur posthumique, pas plus que celle de l’Epître centurique à Henri II. On peut très bien imaginer que l’on ait pris modèle sur l'Epître au Roi, datée de 1558 et introduisant un lot de centuries, après la mort de MDN pour faire de même avec un autre lot de centuries, dans le même contexte. Mais si nous avons la preuve que MDN rédigea une Epître à son fils, par le témoignage des Prophéties d’Antoine Couillard, parues en 1556, cela ne concerne nullement la Préface centurique à César, sensiblement remaniée. En ce qui nous concerne, nous émettons un doute sur le fait que la première édition à 4 centuries soit apparue précédée de ce texte et cela tient au fait que nous émettons l’hypothèse qu’elle puisse avoir été présentée, peut être même avant la mort de MDN, par Mi. de Nostradamus le Jeune qui s’en serait dit, ou non, l’auteur.20 Ce disciple semble avoir obtenu des privilèges en bonne et due forme, tel celui qui figure en tête de la Prognostication pour 1567 : “Il est permis à Guillaume de Nyverd, imprimeur & libraire à Paris, d’imprimer & exposer en vente ceste Prognostication de MI. DE NOSTRADAMUS (les majuscules sont dans le texte) pour l’an mil cinq cens soixante-sept”, en date du “dernier jour d’Aoust 1566”, soit quelques jours seulement - moins de deux mois - après le décès de MDN, survenu le 2 juillet de cette même année 1566. Nous avons fait remarquer, ailleurs, que le portrait qui figurait dans certains textes signés Mi. de Nostradamus (ou d’autres variantes) avait été utilisé par la série MDR, notamment l’édition datée de 1605 et celle, datée de 1568, parue sous la Fronde. A moins de supposer que ces différents textes soient des contrefaçons - ce que nous ne pensons pas - un tel rapprochement nous semble instructif, surtout si l’on ajoute que ce portrait ressemble à celui du poète gascon Auger Gaillard21 dont d’ailleurs des portraits orneront un certain nombre d’éditions des Centuries du XVIIe siècle22, cela est particulièrement net dans l’agencement des boutons de la veste. Ce disciple ou prétendu tel, qui adopte - comme le fera un Crespin - le nom de Nostradamus, serait-il cet Auger Gaillard, ami du poète réformé Du Bartas, et tout à fait apte à versifier, et ce d’autant que certains quatrains, comme le notera le Janus Gallicus, sont rédigés en langue gasconne ?

   Il est possible, nous semble-t-il, que l’on ait substitué à une Epître du disciple autoproclamé ou non de MDN un autre texte. Or, le passage de Mi. de Nostradamus le Jeune à César de Nostredame, fils de MDN n’est pas indifférent : dans les deux cas, ne se situe-t-on pas dans une logique de filiation d’un genre ou d’un autre ? On aura voulu remplacer l’une par l’autre en se servant ainsi du jeune Nostradamus, né en 1553, contre Nostradamus le Jeune et ce faisant, on attribuait à MDN lui-même les Centuries en question. Cela put avoir lieu dans le courant des années 1570. On nous objectera peut-être que nous avons mis en évidence certains rapprochements entre l’Epître à César et certains quatrains23, mais il est possible que certains quatrains des Centuries I-IV aient été retouché par la suite pour s’ajuster à la dite Préface.

   Mais on n’en était pas encore, alors, à affirmer que MDN avait publié des Centuries de son vivant ! Il nous semble que de telles contrefaçons antiposthumiques appartiennent, en fait, aux dernières années du XVIe siècle24 à une époque où abondent d’ailleurs les éditions (Benoist, Héritiers, Pierre) Rigaud.25 C’est bien, en définitive, selon nous, dans les années 1590 - 1620 environ que nous devons nous référer pour gérer le corpus nostradamique qui nous a été conservé.

Jacques Halbronn
Paris, le 22 août 2003

Notes

1 Cf. nos Documents Inexploités sur le phénomène Nostradamus, Feyzin, Ed. Ramkat, 2002. Retour

2 Cf. “la carence nécrologique des éditions 1568”. Retour

3 Cf. RCN, pp. 17 - 18. Retour

4 Cf. notre étude sur “les années 1580 et les ères centuriques”. Retour

5 Cf. notre étude sur la “carence nécrologique”, op. cit. Retour

6 Cf. son Testament de Nostradamus, Monaco, Le Rocher, 1982 et RCN, pp. 125 - 127 et planches des deux éditions, p. X. Retour

7 Exemplaire tronqué, s'arrêtant au quatrain 96 de la VIe centurie, Bibl. Ruzo. Retour

8 Cf. notre texte sur les leitmotive dans le corpus nostradamique. Retour

9 Cf. RCN, p. 125. Retour

10 Cf notre étude sur les différentes familles de canons centuriques. Retour

11 Cf. Chomarat, 2000. Retour

12 Cf. nos Documents Inexploités, op. cit., p. 85. Retour

13 Cf. notre étude sur “Epîtres et épitaphes et le faux centurique”. Retour

14 Cf. RCN pp. 405 et seq. Retour

15 Cf notre étude sur la “carence nécrologique”. Retour

16 Cf. B. Chevignard, Présages de Nostradamus, op. cit. Retour

17 Cf. aussi notre étude sur la carrière et le caractère posthume des Centuries. Retour

18 Cf. nos études sur “Indices de contrefaçon de la Préface à César”. Retour

19 Cf. RCN, p. 123. Retour

20 Cf. notre étude sur la carence nécrologique, op. cit. Retour

21 Cf. notre étude sur “le caractère et la carrière posthume des Centuries”, op. cit. Retour

22 Cf. les pages de titre avec vignettes in M. Chomarat, Bibliographie Nostradamus, op. cit. pp. 62 et 112 - 113. Retour

23 Cf. notre dossier “Indice de contrefaçon dans la Préface à César”, op. cit. Retour

24 Cf. notre étude sur “majuscules et initiales” à propos du rôle de Chavigny. Retour

25 Cf. RCN, pp. 140 et seq. Retour



 

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